Officiellement, le ton a changé. Finies les sorties de la droite aux relents pétainistes sur le vrai travail et les faux travailleurs syndiqués. Explicitement abandonnée, la méthode qui consistait à réunir les confédérations syndicales pour ne jamais les entendre et les mettre face aux forfaits accomplis. La conférence sociale de juillet a eu le mérite de légitimer la négociation sociale et d’établir un calendrier d’échanges entre les différents acteurs sociaux. Autant dire aussi que tout reste à faire. La prise en compte des revendications du monde du travail passe par la création d’un rapport de force qui permettra de concrétiser le changement. Deux chausse-trappes sont cependant sur le chemin.
Le premier piège et de faire passer le dialogue, le consensus et la «culture de la négociation sociale» pour les seules valeurs qui vaillent, quels que soient les résultats obtenus. Le dialogue suffirait à lui seul même s’il ni a rien au bout.
Le second piège consisterait à enfermer les revendications sociales dans une enveloppe rabougrie, où chacun n’aurait que des miettes à partager ou répartir. C’est le sort que destinent à la plupart des services publics, les premières prévisions budgétaires du gouvernement.
Le patronat, pour sa part, entend promouvoir une application très stricte de ses diagnostics et de ses remèdes. Selon lui, les difficultés qui entravent l’économie française, qui plombent les comptes publics et sociaux, et alimentent un chômage massif auraient une seule et unique origine, le coût du travail.
Qu’importent l’envolée des dividendes, le ballet des stock-options, les retraites chapeaux et les salaires faramineux du CAC 40 ! La perte de la compétitivité ne viendrait pas de ces boulets que traînent au pied l’industrie française, mais des mesquines aspirations des salariés à manger convenablement, à se soigner quand c’est nécessaire, et même à se reposer de temps à autre, et notamment à partir de 60 ans. Bel exercice d’illusion !
Ce sont, hélas, de tels raisonnements qui conduiraient à privilégier le transfert des cotisations patronales maladie et famille sur la CSG pour améliorer le financement des comptes sociaux. Alors que les entreprises – surtout les grandes – ont déjà bénéficié de 172milliards d’exonérations de contributions sociales ou fiscales, ces dernières années, il s’agirait de leur faire d’énormes cadeaux supplémentaires, ponctionnés essentiellement sur les paies des salariés et les retraites. Une TVA sociale en quelque sorte, directement prélevée à la source. Ce dossier a ses adeptes dans les palais ministériels. Et des adversaires dans le mouvement social. À eux de se faire entendre et de convaincre la majorité qu’un changement de politique est possible et nécessaire.
Des étudiants précaires pour remplacer les enseignants ?
Michel Sapin, ministre de l'emploi, vient de détailler son projet de création « d’emplois d’avenir » avec en point d'orgue « les CDI à durée déterminée de un à trois ans ». Quelle bonne idée que ne manquera pas d’applaudir le patronat ! Une partie de ces contrats concerne les étudiants : les contrats d'avenir « professeur ». 6000 contrats sont ainsi prévus pour l'année prochaine et 15 000 l'année suivante. Réservés aux étudiants boursiers, ces contrats représentent de réels dangers. Dès la deuxième année de licence et pour une durée pouvant aller jusqu'à trois ans, les étudiants seraient employés dans les lycées et collèges pour des missions pédagogiques qui se rapprochent de l'enseignement. Leur rémunération est bien faible : en cumulant les aides sociales et le salaire à mi-temps, on parviendrait difficilement à 900€/mois.
Prenant acte du fait que les bourses étudiantes sont insuffisantes pour étudier dans de bonnes conditions, le gouvernement propose aux étudiants... des postes précaires pour remplacer les quelques 80 000 postes d’enseignants supprimés sous Sarkozy.
Cette mesure crée un nouveau « petit boulot » nuisible à la réussite des étudiants. Plutôt que d’instaurer les pré-recrutements nécessaires pour permettre à tous les étudiants, quelle que soit leur origine sociale, d’accéder au métier, et reconstituer un vivier d’enseignants, elle crée une nouvelle catégorie de « quasi-enseignants » précaires, peu formés et mal payés. Plutôt qu'éradiquer la précarité étudiante déjà criante, elle ouvre encore plus grandes les vannes de ce cancer qui ronge toute la jeunesse.
Il est temps de rompre avec cette logique libérale ! Les communistes exigent l'abandon immédiat de cette mesure qui va à l’encontre des besoins de l’Éducation nationale comme des étudiants. L’Éducation nationale n’a pas besoin de nouveaux précaires, ni les étudiants de nouveaux jobs !
Nous refusons que la précarité étudiante serve de prétexte à de nouvelles attaques contre le statut des enseignants. Nous réclamons une refondation de la formation des enseignants appuyée sur des pré-recrutements sous statut de la fonction publique. Nous exigeons l'embauche massive d'enseignants et de personnels à la hauteur des besoins existants.